Fais-toi.
Le ciel brillait d’une sanglante
exécution. Il n’y avait plus de place pour le bonheur. Le Soleil, baignant dans
son sang qui tachait les nuages, traumatisait une dernière fois ma vie. J’en
avais rêvé, des crépuscules, comme au cinéma. Mais j’avais attendu trop
longtemps au guichet de la mort, mes jambes se faisaient douloureuses…
Je suis un instant, j’existe. Mort, seul
mon corps demeure, on pourra le tripoter, le maltraiter, l’étudier comme un
objet. Jusqu’à ce que nos frères lombrics s’en fassent un festin. Ma grand-mère
aurait sûrement râlé, si elle savait que
j’avais attendu le coucher du Soleil pour mourir. C’était trop prétentieux à
son goût, contrecarrer « les projets du seigneur » pour mieux épouser
la Nature. Quelle vieille aigrie ! Crépuscule de ma vie, crépuscule de
cette journée qui s’éteint dans mes entrailles. Mais tant de crépuscules et
d’aubes, tant de morts et de naissances, dans l’histoire de l’humanité, dans
l’histoire du monde … Et que de sentiments exprimés, pour des événements si
récurrents ! Au moins ma mort est différente, personne ne me pleurera.
C’est mieux ainsi. J’étais finalement encore un peu fier de moi, je m’étais
créé différent jusque dans ma mort.
Je ferme les yeux. Déjà le marbre
m’habille, si choqué de me trouver sans pudeur. Il paraîtrait que le trépas
soit vulgaire.